Il était une fois… l’histoire de l’Abbaye du Tronchet

Découvrez l’histoire de l’Abbaye du Tronchet, du XIIe siècle à aujourd’hui. S’inscrivant dans des siècles d’histoire, notre Hôtel de l’Abbaye recèle en effet un patrimoine remarquable. Découvrez les secrets scellés dans ses pierres de taille, et remontez le temps à la rencontre d’une communauté bénédictine qui fit rayonner notre région.

La fondation de l’Abbaye bénédictine du Tronchet

Dès la fin du XIe siècle, une première communauté bénédictine s’installa au Tronchet. Une église y fut fondée en 1140, là où se situe le village actuel du Tronchet. À L’origine, le monastère du Tronchet, sorte de Prieuré, dépendait de l’Abbaye de Tyron. L’Abbaye du Tronchet fut établie en 1170 et pris le nom de Notre-Dame du Tronchet en 1200. Son implantation est due à la configuration géographique du lieu, au croisement de deux chemins fréquentés par les marchands qui vont aux foires de Dol et de Dinan, et les pèlerins qui se rendent au Mont-Saint-Michel. Les moines du Tronchet furent fidèles à l’engagement pour Tyron jusqu’au XVe siècle.

Le couvent du Tronchet fut ensuite, jusqu’à la Révolution, détenu par des abbés commendataires, nommés par le pouvoir civil. Le principe de la commende amena la ruine de l’Abbaye et de la vie monastique, les abbés commendataires ne menant généralement plus la vie religieuse et n’y ayant plus résidence, mais en percevant les revenus, dépensant le moins possible dans l’entretien des bâtiments et ne laissant que le strict nécessaire aux moines. À la fin du XVIe siècle, Notre-Dame du Tronchet était tombée dans un état déplorable et presqu’entièrement ruinée. En 1607, Dom Isaac Jaunay déclara :

« le dortoir et le réfectoire étaient ruinés de fond en comble, le cloître était presque dans le même état et l’église était sans vitres et sans ornements. » 

(Archives départementales 35, 5 H 31).

 

L’arrivée de Dom Noël Mars au Tronchet

Dans la première moitié du XVIIe siècle, la Congrégation de Bretagne accepta de réformer l’Abbaye du Tronchet. Les lieux réguliers furent clos et restaurés. En 1607, Dom Noël Mars, accompagné de six religieux, prit possession du monastère, selon les règles sévères des réformés de Saint-Magloire de Léon.

 

« Ils devaient tous les jours se lever à minuit ; leurs matines duraient trois heures les jours ordinaires et quatre les jours de fête. Ils disaient tous les jours l’Office de la Sainte Vierge avec l’Office canonique. Ils chantaient tous les jours deux grand’messes. Après matines, ils faisaient une demi-heure d’oraison mentale, et autant après complies. L’intervalle entre les deux grand’messes et celui entre le dîner et les vêpres étaient employés à des lectures de piété et au travail manuel. Ils gardaient une abstinence rigoureuse et observaient exactement les jeûnes prescrits par la règle. »

(AN, VS 1230. Trévinal, II, p. 107.)

La congrégation de Saint-Maur au Tronchet

En 1628, l’Abbaye passa aux mains de La Congrégation de Saint-Maur, et « bientôt cette Abbaye redevint un lieu de bénédiction. L’office divin s’y fit avec édification, les lieux réguliers furent rétablis et la règle fut observée avec exactitude » (Dom Germain, Histoire manuscrite, B.M. de Truncheto). Les moines décidèrent d’abandonner les ruines dans lesquelles ils se trouvaient et de construire un nouveau monastère. Il ne reste aujourd’hui aucun vestige de la première Abbaye fondée au XIIe siècle, les bénédictins l’ayant démolie pour en réemployer les matériaux.

La construction de la nouvelle Abbaye au Tronchet

Les moines du Tronchet choisirent d’implanter le nouveau monastère sur la colline dominant l’ancien site, dans des conditions plus salubres. La première pierre des nouveaux bâtiments fut bénite le 11 juillet 1642, la première pierre de l’église abbatiale fut posée en 1659 et le tout achevé en 1679. Le monastère formait un carré et entourait un cloître intérieur. Il était constitué d’un dortoir, de lieux réguliers, d’une maison abbatiale avec un corps de logis servant d’écuries, d’une grande cour au-devant et d’un jardin à l’arrière, doté d’un verger et d’un pressoir, de bois, de trois étangs et d’un moulin à eau (Déclaration de l’Abbaye du Tronchet en 1685 communications M. L’Abbé, Paris-Jallobert, Pouillé, op. cité.). L’église du Tronchet se compose quant à elle d’une seule nef terminée par un chevet droit. La façade présente une porte flanquée de colonnes, de niches et de pilastres dans le style du XVIIe siècle. Au-dessus de la porte principale de l’église on peut voir une fenêtre de style rayonnant, à doubles meneaux, dernier vestige de l’église abbatiale du XIIe siècle, apportée là de l’ancien monastère.

Les disciples de Saint-Maur rendirent ainsi la prospérité, tant spirituelle que matérielle, au Tronchet. Plusieurs prieurés dépendaient de l’Abbaye du Tronchet : Saint-Lunaire de la Barre, La Chattière, Saint-Lunaire de l’Hostellerie, Notre-Dame de Lillemer, Saint-Columban de la Marre-Ferron, Saint-Denis de la Roche-Montbourcher, Saint-Pierre et Saint-Paul de Roz-Landrieuc, Saint-Petreuc et Saint-Nicolas du Vieux-Chastel. En 1698, l’Abbaye du Tronchet fit enregistrer les armoiries suivantes :

De sable à une crosse d’argent accostée de deux fleurs de lys d’or.

 

La Révolution Française

L’Abbaye du Tronchet fut maintenue jusqu’en 1766, date à laquelle elle fût officiellement supprimée en vertu de l’édit du 3 mars 1768, car jugée trop petite. Elle fût rétablie en 1774 puis de nouveau dissoute en 1786, bien que subsistant jusqu’à la Révolution. L’Abbaye fut pillée et saccagée pendant la Révolution Française et fut en partie démolie, grand nombre de ses pierres servant à la construction des quais de Saint-Servan et pour l’édification du presbytère de Roz-Landrieux.

Les vestiges et bâtiments de l’Abbaye du Tronchet aujourd’hui

Les habitants du village du Tronchet se cotisèrent pour acheter la maison conventuelle en 1826. En 1856, des travaux d’envergure sauvèrent l’Abbaye de sa destruction totale. De nos jours, l’église devenue paroissiale est toujours consacrée au culte. Il ne reste de l’ancienne Abbaye que le bâtiment méridional transformé en presbytère avec ses 5 fenêtres de façade. L’entrée occidentale, par laquelle se font aujourd’hui les visites, était autrefois la porte réservée aux pauvres et où se faisait la distribution des aumônes. Quoique complètement découvert, le cloître est encore presque complet. Les restes de l’Abbaye ont été inscrits à l’inventaire des monuments historiques le 26 juillet 1933. L’ancien logis abbatial abrite aujourd’hui l’Hôtel de l’Abbaye et le restaurant gastronomique Le Jardin de l’Abbaye.

L’Abbaye du Tronchet dans les écrits de Chateaubriand

Chateaubriand, dans ses « Mémoires d’Outre-Tombe », évoque l’Abbaye du Tronchet en termes poétiques, teintés de nostalgie :

« Plus loin, on vit aussi du bien de famille, au Tronchet, près la forêt du Mesnil. Sept cents ans auparavant, les seigneurs de Combourg avaient fondé là, prétendaient-ils, une Abbaye bénédictine, tombée plus tard en décadence à l’époque maudite de la commende, réformée dans les larmes du repentir par l’intrépide Noël Mars et s’éteignant insensiblement sous la crosse négligente de dom Jean-Jacques Provost de la Boissière de Boisbily ».

 

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Sources :

Les établissements religieux dolois – Les bénédictins du Tronchet – Michel Pelé
Maire Le Tronchet
Abbaye Notre Dame du Tronchet 1170 – 1789 – Abbé Fr. Rocher, recteur
Le Tronchet Des origines à nos jours – Maryvonne Dumas